
Manu, fan du Toronto Wolfpack à Montréal
On évoque beaucoup la situation du club canadien qui évolue dans le championnat anglais, une première en rugby à XIII. Pour en savoir plus, nous avons pu contacter un fan francophone basé à Montréal. Un entretien très instructif.
Avec la proximité du match face à Toulouse nous sommes entrés en contact avec Emmanuel Angiuoli. Manu est d’origine italienne, né en Belgique, vit au Québec, depuis plus de 12 ans et est passionné de XIII depuis un voyage en Australie, patrie de son épouse. Du coup quand l’équipe de Toronto devient la première professionnelle au Canada, il était évident qu’elle aurait ses supporters québécois.
Tout d’abord j’aimerais savoir comment vous vous êtes mis à supporter Toronto et à suivre le XIII dans un pays où ce sport est « mineur » ?
Effectivement au Québec, le XIII est inexistant. Il n’y a aucune équipe, aucune ligue même amateur, et aucune chaîne de télé francophone ne le diffuse. Les matchs de NRL et Super League sont diffusés sur certains réseaux anglophones spécialisés depuis le début des années 2000, mais cela reste très peu regardé.
Les personnes qui connaissent ce sport sont surtout les nombreux expatriés français, anglais et australiens qui vivent à Montréal. Pour les autres, ils ont une histoire assez similaire à celle d’Eric Perez : ils ont découvert ce sport lors d’un voyage dans un pays du XIII et sont tombés sous le charme. Pour ma part c’était en 2012 lors de ma première visite en Australie. Je connaissais le XIII de nom, et j’avais déjà vu quelques matchs à la télé, mais de voir un match de NRL dans une région où ce sport est numéro un, avec les meilleurs joueurs du monde et des partisans passionnés, j’ai tout de suite été séduit.
De retour au Canada, je me suis mis à rechercher des équipes locales, mais à part la ligue ontarienne lancée par Eric Perez, il n’y avait rien. Malgré cela, je suis resté en contact avec la ligue ontarienne et j’ai fait le voyage vers Toronto pour assister à certains matchs de l’équipe nationale canadienne, mais évidemment Eric nous a tous impressionné quand il a décroché le droit d’aligner une équipe dans le système anglais, et encore plus quand il a convaincu Air Transat, une société basée à Montréal, d’être le commanditaire principal de l’équipe.
Effectuez-vous des déplacements au Lamport Stadium ? Quelle est l’ambiance sur place ? Quel public est attiré selon vous ?
J’ai réussi à rassembler quelques partisans montréalais et nous étions, pour ce qui est de mon groupe, une petite dizaine pour le premier match au Lamport l’année dernière, mais je suis certain que d’autres Québécois se sont déplacés par eux mêmes.
L’ambiance était assez bonne mais calme pour les premiers matchs, les gens semblaient vraiment découvrir quelque chose de tout nouveau. Les Torontonians sont naturellement curieux en terme de sport. Si on pense au baseball, au basketball, au football-soccer, tous les projets d’expansion ont remporté un franc succès à Toronto. Même au niveau amateur, c’est en Ontario que se trouve la principale ligue de football australien hors Australie. Le football américain mais aussi le cricket pensent à se lancer à Toronto également. C’est vraiment le terrain idéal pour ce genre de projet.
Avec le Wolfpack, beaucoup de gens découvraient le XIII pour la première fois, parfois même en pensant être venu voir un match de XV. Mais ce qui m’a impressionné c’est que ce public est revenu, en plus grand nombre encore, malgré la faible opposition offerte par les autres équipes de League One.
Sur place, j’ai également rencontré beaucoup d’expatriés australiens et anglais, fiers de voir leur sport joué à haut niveau sur un nouveau continent.
Le gros atout du Stade Lamport c’est évidemment le Beer Garden. Une équipe professionnelle qui proposent des bières et cidres artisanaux de qualité à des prix abordables, cela reste très novateur et permet de socialiser et promouvoir le sport encore plus avant et après le match.

Le public est venu nombreux pour assister à la 14ème journée de League 1 entre le Toronto Wolfpack et Gloucestershire (08/07/2017).
Comment voyez-vous cette première confrontation entre canadiens et français ?
C’est une énorme opportunité de célébrer et promouvoir le rugby à XIII global et international. Qui aurait pensait il y a quelques années encore qu’un jour un championnat anglais de rugby à XIII aurait pour affiche Toulouse – Toronto ? Pour le public canadien, c’est une occasion de bien se rendre compte que le XIII est aussi une affaire sérieuse en France, avec une histoire et une tradition bien solide. Pour le public toulousain, c’est certainement toute une curiosité également de découvrir ce club d’expansion improbable qui suit leur trace de League One au Championship, avec les mêmes ambitions de promotion au plus niveau le plus vite possible.
C’est aussi une bonne opportunité de fraterniser avec des partisans d’une autre région d’Europe. Si les supporters de Toulouse ont des chants à nous apprendre, nous sommes preneurs. Après tout, les partisans du Toronto FC ont adopté un chant bien français dans leur stade, le fameux “Qu’est-ce que vous chantez ?” du RC Lens si mes sources sont bonnes.
Comment imaginez-vous l’évolution du XIII dans les années à venir avec en point d’orgue la Coupe du monde 2025 ? Croyez-vous que cela puisse prendre au Canada et même aux USA ?
C’est encore trop tôt pour crier victoire. La deuxième saison est cruciale pour le Wolfpack, car l’opposition est beaucoup plus féroce que la saison dernière, on l’a déjà bien ressenti dans les premiers matchs, et on connaît encore assez peu nos partisans pour savoir s’ils vont vraiment revenir cette année au Lamport.
Pour 2019, je pense qu’il est encore un peu tôt pour une deuxième canadienne, même si on rêve tous d’une deuxième équipe ontarienne ou d’une équipe à Montréal bien entendu.
Par contre, un rival américain permettrait vraiment d’assurer une visibilité maximale dans les médias locaux et une meilleure couverture télé. Les États-Unis sont également un endroit idéal pour développer un nouveau sport comme l’ont montré la NHL dans les états du sud sans tradition de hockey sur glace et la MLS plus récemment. C’est également un must en vue de la Coupe du monde de 2025 qui aura bien besoin d’un maximum de matchs de haut niveau joués sur sol nord-américain pour assurer sa promotion.
Mais au-delà de tout ça, le gros défi restera de former des joueurs locaux. Nous partons vraiment de zéro. Il n’y a aucune école de XIII, aucun programme scolaire ou universitaire ne propose le XIII, tout est axé sur le football américain/canadien et sur le XV qui connaît un boom au niveau scolaire et amateur tant aux États-Unis qu’au Canada.
Si une ou deux équipes nord-américaines arrivent à attirer les regards et à remporter de beaux succès, cela aidera surement à susciter des vocations dès le plus jeune âge et à faire entrer le XIII dans les réseaux scolaires, mais la route est encore longue.
Vous pouvez retrouver Manu sur Twitter qui donne des informations en français sur le Toronto Wolfpack ⤵
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