
XIII made in France #10 : Thierry Dumaine, passionnément XIII
Treize Mondial a décidé de mettre en avant les personnes qui participent au développement du XIII en France. Pour le dixième épisode de « XIII made in France », un invité de choix, Thierry Dumaine, amoureux de XIII et ancien coach des Dragons Catalans U19.
Thierry, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Thierry Dumaine, j’ai 46 ans et je suis originaire de Cavaillon. Je vis à Carcassonne mais je travaille depuis le mois d’avril à l’INSEP après 22 ans de rugby à XIII.
Vous avez un nouveau poste à l’INSEP, pouvez-vous nous en dire plus ?
C’est une nouvelle page pour moi ce poste à l’INSEP. Je suis responsable de l’unité d’accompagnement à la performance. Une de mes missions est de gérer 13 spécialistes, des préparateurs physiques ou diététiques, des psychologues ou encore des personnes qui interviennent sur du yoga, qui ont pour vocation à répondre aux besoins des différentes fédérations olympiques et des pôles installés à l’INSEP. Ces spécialistes, chacun dans leur domaine, interviennent soit au près d’un athlète soit au près d’un groupe d’entrainement.
Paris 2024, c’est dans 6 ans, si vous avez la possibilité de continuer votre mission jusque là, le ferez-vous ?
Cette cellule est vouée à se développer et notre priorité dans nos interventions sont les médaillables de Tokyo 2020 et Paris 2024. J’espère pouvoir continuer ma mission jusqu’aux Jeux Olympiques en France car vivre cela, à la maison, cela doit être quelque chose d’extraordinaire. Je fais ma mission à fond et on verra bien où cela me mène mais si j’ai la possibilité d’aller jusqu’en 2024, je le ferai.
Est-ce que cela n’a pas été compliqué de quitter les Dragons et les U19 ?
Cela a été compliqué de quitter le groupe et le staff, humainement parlant. Je n’avais pas de regret de quitter la structure en elle même car les personnes qui sont à sa tête sont compétentes. Vis à vis des jeunes et du staff comme Bruno Verges, Pierre Metzinger ou Patrick Noguera, ce n’était pas le bon timing et un peu plus compliqué car ils sont avec moi dans le projet depuis le début.
Êtes-vous satisfait de ce que vous laissez à votre successeur pour les U19 ?
Objectivement, je suis plutôt satisfait, car chaque année nous sommes évalués par un cabinet extérieur à la RFL et qu’au bout de deux ans nous avons eu l’accréditation catégorie 1 mention excellence. C’est une belle reconnaissance du travail de tout le staff et tous les bénévoles qui ont participé à ce projet. Ensuite comme dans tous les projets, la première phase de structuration a été réalisée et si j’étais resté un peu plus longtemps, je serais passé dans une phase d’optimisation. Car si on fait un constat sur les quatre ans, purement chiffré, il est positif, mais il faut voir plus large que cela et nous avions fait en sorte que de jeunes joueurs puissent nous rejoindre d’un peu partout en France et puissent disputer quelques matchs de Super League, c’est une bonne chose. Le prochain objectif aurait été d’améliorer la structure pour que ces joueurs deviennent des incontournables de la Super League et pas seulement des joueurs qui font quelques apparitions.
Quel genre de relation y’a t-il entre l’équipe première et les U19 ? Qu’est-ce qui serait à revoir ?
Que ce soit à l’époque de Laurent (Frayssinous), qui a beaucoup porté le projet avec le président ou avec Steve, ensuite, les relations étaient excellentes. Tout le club a découvert ce que pouvait être le niveau académique. Steve nous suit beaucoup, la preuve, l’année dernière il a proposé à 6 joueurs un contrat. Nous avons mis en place les U16 assez rapidement, il y a aussi les U23, qui font partie des meilleurs équipes d’Elite 1, et dont beaucoup de joueurs sont issus des U19. L’un des projets pour continuer le développement de notre structure et les passerelles entres ces équipes était d’aller confronter les U23 aux réserves des équipes anglaises, pour continuer leur apprentissage. À voir si le club décide de mettre en place cela.

Thierry Dumaine en compagnie de Jordan Flovie – Crédit : Neko Grouch
Comment jugeriez-vous la formation française dans le rugby à XIII ? A votre avis par rapport à d’autres sports collectifs, est-elle au niveau ?
La juger c’est difficile mais ce que je sais c’est que par mon expérience, il y a beaucoup de compétences dans les clubs, notamment ceux amateurs, qui arrivent à sortir régulièrement des joueurs de qualité. Plus globalement, je pense qu’il faut accorder plus d’importance au développement du joueur notamment chez les benjamins et minimes plutôt qu’aux trophées. En Académique, nous avions réussi à allier les 2, la compétition était un outil pour développer le joueur. Si on rapporte cela au réservoir de jeunes qu’on a en France, il y a vraiment du travail de qualité de fait. Et le plus important est d’augmenter ce réservoir car la réalité est qu’on a 600 cadets donc 1 chance sur 30 d’être en équipe de France. En Angleterre, les jeunes de cet âge ont même pas 1 chance sur 500 et si on compare avec l’Australie l’écart est encore plus important. Les compétences et la passion sont là, manque le réservoir.
Ensuite pour se comparer aux autres sports, ce qui est sur c’est que même si les fédérations ont leur mot à dire, la formation se fait dans des structures professionnelles. En France, il y en a que 2, les Dragons et Toulouse, et c’est eux qui doivent prendre en main la formation des jeunes pour le plus haut niveau.
Nous battons souvent les meilleurs équipes nationales en jeunes mais il y a encore un écart pour l’équipe première, comment l’expliquez vous ? Que faire pour le combler ?
A partir de 2009, j’ai coordonné les équipes de jeunes à la fédération et nous avons mis en place un projet de jeu ambitieux. Il y a une vraie dynamique qui s’était mise en place dans la formation des jeunes joueurs. Ensuite quand on sélectionne des joueurs, il y en a trois types, les joueurs à potentiel, les joueurs opérationnels et ceux qui ont du talent. Et je pense que de par leur réservoir, les anglais ou les australiens sont plus sur les joueurs qui ont du talent ou à potentiel plutôt que les opérationnels. Nous avions commencé à essayer d’inverser la tendance en France car par exemple on retrouvait souvent en cadets les meilleurs du moment, les joueurs que j’appelle les opérationnels. Alors que la question n’est pas vraiment de savoir s’ils sont bons aujourd’hui mais s’ils seront bons demain. La difficulté pour les sélectionneurs c’est de faire des choix, de laisser grandir des joueurs et d’arriver à l’expliquer à un groupe. Un cadet qui a atteint sa maturité physique et qui survole le championnat, bien souvent on ne le retrouve pas chez les juniors et il disparaît complètement quand ils passent en première.
Donc oui il y a un problème de réservoir comme je disais auparavant, plus il y aura de joueurs, plus il y aura de la qualité. Et le deuxième point important, et la fédération travaille dessus, c’est le niveau de compétition en club qui fait que les jeunes joueurs continuent de progresser. SI vous prenez la NRL, qui est le championnat le plus fort, elle fournit 8 équipes nationales. Donc la professionnalisation de notre sport en France est un élément capital pour notre progression. La fédération française en a conscience donc j’espère que nous allons réussir à avancer.
Quel est le joueur que vous avez croisé qui vous a le plus impressionné ? Et pourquoi ?
Rémi Casty, j’ai eu la chance de l’entraîner quand il avait 17 ans. L’année suivante il était pilier avec l’équipe de France, à son âge à l’époque, c’est impressionnant et rare. Je l’ai retrouvé plus tard et ce qui me marque le plus c’est sa longévité, son professionnalisme et les valeurs qu’il incarne. C’est vraiment quelqu’un d’humble, qui a envie de transmettre et qui se remet souvent en question. Il a le plus beau palmarès de tous les joueurs français confondus pour moi avec un passage en NRL et une demi-finale. Il intervenait avec moi chez les U19 et c’était vraiment bénéfique pour les jeunes, je pense que cela sera un super entraîneur.