Aurélien Cologni : « Reconstruire une équipe de France forte »
À l’approche des échéances importantes pour l’équipe de France, nous avons rencontré Aurélien Cologni, sélectionneur de l’équipe de France, pour faire un tour d’horizon complet de la situation des Bleus.
Aurélien, avec un an de recul, quel regard portes-tu sur la Coupe du monde et la performance de l’équipe de France ?
On peut le voir sous deux angles. Le premier c’est de dire que l’objectif n’a pas été atteint et nous avons tous été déçus et affectés par ce résultat. Et le deuxième, et celui que je retiens, cela a été très enrichissant pour l’avenir de l’équipe de France. Il faut savoir poser les bases d’une équipe pour la construire et je pense que nous avons posé de belles fondations sur cette Coupe du monde avec des joueurs qui n’avaient jamais joué à un tel niveau. En prenant en compte les nombreuses absences je pense que l’équipe s’est bien comportée même s’il y a plein de points à améliorer. Nous avons vu où nous en étions par rapport aux grandes équipes. On a été capables de se comporter très dignement sur ces rencontres, on a pêché par un manque de régularité sur la longueur.
Est-ce qu’il y a des choses que tu ferais différemment ?
Moi aussi je suis un peu en apprentissage à ce niveau et puis l’équipe nationale cela n’a rien à voir avec un club. Je connais bien moins le comportement de certains joueurs sur et en dehors du terrain et c’est à moi d’essayer de m’adapter. Un exemple, un joueur comme Théo Fages sur le match contre le Liban, je lui ai demandé certaines choses qui n’ont pas fonctionné donc avec le vécu je peux m’adapter aux caractéristiques de chacun. Avec le staff, nous allons arriver à cibler beaucoup mieux les besoins de l’équipe de France pour réussir à avoir des résultats. Je m’enrichis de ce que je vois et de ce que j’apprends aux contacts des joueurs pour ensuite essayer de tirer le meilleur de chacun.
Comment travailles-tu au quotidien entre les stages pour suivre les joueurs et composer ton groupe ?
Déjà je suis en contact avec tous les entraîneurs que ce soit en Elite 1, Championship ou Super League, ils sont mes premiers relais. J’échange beaucoup avec eux, ce sont un peu mes lieutenants car ils restent déterminants dans le choix des joueurs que je vais faire.
Ensuite je me sers de la vidéo, je regarde beaucoup de matchs et enfin je m’appuie sur mes deux assistants, Renaud Guigue et Thierry Dumaine. Chacun doit suivre certains joueurs et on en discute ensuite. Thierry plutôt les jeunes et Renaud les joueurs d’Elite 1.
Avant de parler des joueurs retenus, un mot sur les absents, Eloi Pelissier et Hakim Miloudi, c’est toujours pour des raisons disciplinaires ?
C’est sûr qu’un incident comme celui qui s’est passé dans une compétition de très haut niveau, c’est dommageable pour tout le monde, pour le joueur, pour l’équipe et pour l’image. J’ai été très touché par ces faits et j’ai besoin de l’avaler, de le mûrir et de le réfléchir. Après je considère qu’on ne peut pas pénaliser les gens à vie, il faut payer sa faute et quand c’est fait il faut arriver à passer outre. Ils ont été sanctionnés pour ce qui s’est passé, je suis attentif à leurs réactions et à leur attitude suite à cela et j’aviserai. La porte n’est pas fermée, ni pour l’un ni pour l’autre.
Pour Mark Kheirallah, quels sont les raisons de son absence ?
Mark est un garçon très utilisé avec Toulouse, il a fait une Coupe du monde 2017 exceptionnelle et c’est un joueur d’une grande qualité. Il a fait le choix de mettre de côté l’équipe de France cette année pour se gérer un peu physiquement, il y a des échéances importantes avec le TO. Même si je comprends ce choix, c’est dommageable parce qu’on peut tous avoir un argument sérieux pour rester au repos ou à disposition de son club. Et pour un international l’enjeu est d’arriver à mener les deux de front.
On connaît les divergences avec les Dragons et les absents ou risque d’absences, comment gères-tu cela ? Comment fonctionner pour les éviter ?
Il y a encore pas mal de choses à améliorer sur le fonctionnement de l’équipe de France mais il ne faut pas oublier que j’ai hérité d’une équipe à la dérive au niveau structurel et état d’esprit. Il y avait un vrai challenge et beaucoup de travail mais je vais tout faire pour atteindre mon objectif, c’est à dire reconstruire une équipe de France forte. Cela ne se fera pas du jour au lendemain, il faut ménager les objectifs des uns et des autres et qu’on réussisse à trouver des consensus. Il faut entendre les objectifs des uns et des autres sans forcément se braquer, notre plus grosse difficulté à XIII c’est que dès que quelqu’un a une vision différente il est forcément contre. On peut ne pas être d’accord sur tout sans non plus s’opposer les uns aux autres.
Je bâtis un groupe annexe avec des joueurs Elite car je veux les intéresser et les inclure dans le projet de développement de l’équipe de France. J’intègre aussi des jeunes, c’est pour cela que quelques U19 sont présents sur les stages. Je veux emmener tout le monde dans le bateau France, et dans celui-ci il faut absolument que les clubs y montent en premier.
Le match des Provinces d’Origines arrive, quel est l’intérêt de cette rencontre ?
On a bossé tout l’été avec des joueurs d’Elite 1 pour les amener à ce match de « sélection ». On va y intégrer des U19 qui sont champions d’Europe et on va en sortir un groupe intermédiaire qui va aller jouer contre la Serbie. Je m’appuierai sur ce match pour peut-être en intégrer quelques-uns contre l’Angleterre ou pendant le Championnat d’Europe. Les Provinces d’Origines sont la première marche jusqu’aux matchs de l’Euro.
Est-ce qu’à l’heure actuelle tu as en tête la grosse partie du XIII que tu aimerais aligner ?
J’avais des certitudes dans la construction de mon groupe mais avec les forfaits de Garcia ou Bousquet, cela complique un peu les choses surtout en termes de puissance car contre les équipes du Top 3 il faut des joueurs de ce standing. Cela remet donc en cause ce que j’ai prévu mais cela va donner la chance à d’autres. C’est dommageable pour l’équipe de France mais les autres sur le terrain devront briller pour essayer de bousculer la hiérarchie.
Le forfait de Benjamin Garcia, que tu utilisais au talon, cela doit te compliquer la tâche à ce poste ?
Benjamin, je l’avais utilisé talonneur à la Coupe du monde donc son absence remet en cause la construction et la structure de l’équipe. Cela ouvre la porte aux autres joueurs qui devront faire leur preuve. Je suis en train de réfléchir à la meilleure solution et les stages qui se succèdent m’aident à trouver la meilleure solution à ce poste.
Es-tu satisfait de l’implication des joueurs sur ces stages ?
Sur tous les stages que j’ai fait avec des professionnels ou des joueurs d’Elite, l’implication a été exceptionnelle à chaque fois ! Ils ont tous envie de jouer pour l’équipe de France et de donner le maximum. À nous de les mettre dans les meilleures dispositions pour qu’ils puissent venir en sélection sans aucune retenue.
À quelle date communiqueras-tu la liste pour l’Angleterre ?
Le 26 septembre nous avons un dernier stage, et je donnerai la liste pour l’Angleterre juste avant ou juste après le match contre la Serbie.
Cinq joueurs d’Elite 1 étaient convoqués le 4 septembre, ce sont ceux qui ont le plus de chances de jouer face à l’Angleterre et à l’Euro ?
Ils ont de l’avance au niveau de leur préparation c’est sûr mais la porte n’est fermée pour personne, si certains du groupe « suivi » brillent sur le match des Origines et qu’ils sont prêts, ils auront autant de chances que les autres de jouer l’Angleterre ou le Championnat d’Europe. C’est pour cela que ce match des Origines va être important car tout le monde partira avec les mêmes chances pour la suite.
Quel objectif pour l’Euro en termes de résultats et de jeu ? Et face à l’Angleterre ?
L’Angleterre ça reste un match de préparation, ce n’est pas un match officiel. Il va permettre de se préparer au championnat européen qui est l’échéance importante donc des essais seront faits contre l’Angleterre.
Pour l’Euro, l’objectif est de remporter la compétition en gagnant les trois matchs.
Dans le jeu, j’ai envie d’installer de la continuité, de jouer après contact et dans les espaces. Mais il y aura aussi un peu de jeu structuré car c’est une volonté des joueurs pour réussir à se retrouver mais en gardant une vraie capacité à s’ouvrir dans le jeu libre pour assurer une continuité.
J’ai une ambition sans faille, bien sûr que j’aimerais avoir tous les joueurs à disposition mais ce n’est pas une entrave pour se qualifier pour la Coupe du monde. Je suis paré à traverser les épreuves et les difficultés et j’emmènerai avec moi les joueurs qui sont dans le même état d’esprit que moi.
On doit tous être derrière le 13 de France. C’est la vitrine du rugby à 13 qui sera mise en avant par les médias en cas de performances. Remporter la coupe d’Europe même avec quelques absents de taille apportera un nouvel éclairage sur notre sport. Après les U19 et les Dragons, l’équipe de france peut clôturer en beauté cette saison 2018.
Aurélien Cologny, est un grand entraîneur je suis sûr qu’il amènera loin le XIII de France dans cet Euro, et qualifiera l’Equipe de France pour la Coupe du Monde de 2021 ! …..
Tous derrière Aurélien et le treize de France !
Ouverture d’esprit, intelligent, compétent, mesuré et une saine ambition. J’ai beaucoup de respect pour ce Monsieur. Espérons que tous les treiziste avancent dans la même direction dans l’intérêt du XIII en France.